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Hommage à la ZAD, hommage aux 100 Noms

mardi 10 avril 2018, par Contribution

L’expulsion de la ZAD est une ignominie.
Sous couvert du respect de l’état de droit – discours qui ne tient que parce que médias et gouvernements ont depuis des années installé le stéréotype du zadiste extrémiste et ultra-violent –, l’État, sans doute désireux de venger le renoncement auquel il a été acculé, n’a fait que manifester l’usage d’une violence aveugle et destructrice.
Destructrice d’une expérience collective de lutte qui, par sa détermination et sa créativité, a pu sauver 1600 hectares de bocage et de forêt du bétonnage inutile auquel il était promis. Destructrice des projets de vie que beaucoup ont construit ici. Destructrice du désir d’inventer un monde différent, porté par un sens du faire-commun et un autre rapport au milieu vivant. Un monde différent pour échapper au monde de la destruction.

Comme disent les zapatistes : " ils détruisent ; nous construisons "...

Et parmi tous les lieux détruits, avoir réduit à un tas de ruines les 100 Noms provoque une colère et une incompréhension toutes particulières. Il s’agissait d’une maison en bois chaleureuse et accueillante, où vivaient huit personnes. Ses habitant.e.s élevaient environ 80 moutons (deux agneaux sont nés dans la nuit précédant l’expulsion) ; ils avaient aussi développé d’autres projets agricoles. Aujourd’hui, un huissier, qui n’a même pas été en mesure de leur présenter un document d’ordonnance d’expulsion, leur a laissé dix minutes pour quitter les lieux, sans même pouvoir récupérer leurs affaires personnelles, avant que la maison ne soit abattue.


Pour Greenpeace, « expulser et menacer de destruction un lieu de vie comme les Cent Noms où bergerie, potagers et autres projets agricoles fleurissent, illustrent l’absurdité de l’action du gouvernement sur place et de l’incohérence de son discours », alors même que la préfecture avait annoncé une évacuation ciblée, ne concernant pas ceux qui étaient désireux de s’inscrire dans des projets agricoles ou para-agricoles.
Alors, oui, c’est vrai, les 100 Noms, pas plus que d’autres habitant.e.s de la Zad, n’avaient déposé de projets individuels, comme l’exige la préfecture. Non pas parce qu’ils étaient opposés à toute forme de régularisation. Mais parce que toute leur démarche, depuis leur installation dans le bocage, a été collective et parce que le projet de vie qu’ils ont élaboré est collectif. Or, cela, la préfecture refuse de le prendre en compte. On voit donc bien que la lutte se joue entre deux mondes, entre deux conceptions du monde. Et que celle qui promeut les normes du monde de l’Économie entend s’imposer comme un rouleau compresseur, même si la route qu’il trace mène au désastre programmé.

Marcel Thébaud, paysan historique de la ZAD, sourit tristement : « Les Cent Noms, c’est un lieu moteur que tout le monde reconnaît pour organiser la zone, faciliter les relations entre les composantes , préparer l’avenir avec des activités agricoles, intellectuelles et sociales. C’est un lieu proche de la route D281 qui a eu un rôle de tampon, de modération pour chercher une solution universelle au sein de la ZAD. » Les Cent Noms sont l’un des lieux de la zone à avoir le plus tissé de liens avec les paysan·ne·s historiques, le monde agricole local. « Si on détruit les Cent Noms, on tue l’espoir et on sème la colère. »
Alors, la tristesse est grande de voir à terre la maison des 100 Noms et sa bergerie, que quelques dizaines de personnes avaient tenté de protéger en se perchant sur son toit. Ainsi que bien d’autres lieux de vie et d’activités.
Mais la colère nourrit aussi l’élan solidaire et l’adhésion partagée au désir de vie qu’incarnent ces lieux.
Vive les 100 Noms, les 100 Noms renaîtront.
Vive la ZAD, la ZAD vivra.

Jérôme et Rocio